La culture a donné un sens à ma vie, elle m’a construite, m’a nourrie et j’ai tenté dès que j’ai enseigné, de transmettre à mes élèves le pouvoir de tous les langages de l’art, de faire jaillir leur imaginaire. Je n’ai pas toujours réussi. Mais j’ai transmis – avec des collègues qui ne m’avaient pas attendue pour faire vivre l’atelier-théâtre (Hélène Capdeville, Michèle Lassalle) – avec des principales et des principaux, Florence Boulley, la MAC, Florence Cailton et Lucille Méziat.
« La culture ne s’hérite pas, elle se conquiert.« (André Malraux)
Enfant née en 1950 dans un monde ouvrier, j’ai eu la chance d’avoir un père-maire d’un petit village du Béarn – et un instituteur qui m’ont fait découvrir, très tôt, des univers culturels qui ne m’ont plus quittée. Découverte de la littérature, du cinéma, du théâtre, de la peinture, de la musique classique. Je me souviens de mes premières émotions et de mon désir d’aller plus loin. Comprendre n’était pas l’essentiel. Cela viendrait plus tard. Mais ressentir, vibrer, désirer, absorber, m’ouvrir à des auteurs, des compositeurs, des peintres. Berthold Brecht et sa Mère courage… à Nay : j’avais 16 ans. Sûrement l’éveil de ma conscience politique, des multiples combats à mener.
Car la culture est politique. Le choix qui est fait par la municipalité actuelle de déléguer en dit long sur le peu d’intérêt qu’elle porte à la culture. Le fait de supprimer le festival « Les Mouvementées » en dit long sur sa méconnaissance du spectacle vivant.
Aucun public n’est acquis. Il faut aller le chercher, l’entraîner, ne pas le mépriser : certaines personnes n’osent pas fréquenter les lieux de spectacles. « Je pensais que ce n’était pas pour moi« , m’ont dit deux Mimizannaises qui vont voir une pièce de boulevard, une pièce de Molière, aussi bien qu’elles vont écouter un quatuor à cordes de l’Orchestre national de Bordeaux-Aquitaine (ONBA). Elles rentrent chez elles, émues, déçues, choquées… Des émotions, des ressentis dont nous parlons. Nous ne sommes pas d’accord ? Tant mieux. Elles ont franchi une porte qu’elles pensaient leur être interdite. Et l’ouvrent à d’autres.
Le public, il faut aussi le renouveler. Au Parnasse, je vois bien la moyenne d’âge… les fameux seniors : les vieux, donc, dont je fais partie. Ceux qui ont du temps, ceux qui ont reçu – peu ou prou – une éducation artistique. Où sont les jeunes ? J’en ai marre d’entendre qu’ils ne sont occupés que par les jeux-vidéo, qu’ils ne lisent pas. Ils ont leur propre culture : il faut en tenir compte. A leur âge… certes, je lisais Balzac et Zola, mais je chantais du Claude François et du Frank Alamo. S’ils sont accompagnés, si les enseignants, les acteurs culturels les amènent vers d’autres horizons… ils seront preneurs. Je l’ai expérimenté et à l’heure de la retraite, certains élèves me l’ont rappelé : ça marche ! Alors, que devons-nous proposer aux jeunes spectateurs ?
Un véritable projet doit être remis en place avec les écoles, le collège pour les attirer et leur donner le goût de toutes les pratiques artistiques. C’est là que tout se joue.
Ne pas seulement proposer des tarifs préférentiels ou des spectacles « spécial jeunes ». Diversifier l’offre culturelle : elle doit donner le goût d’un certain théâtre, d’un certain cinéma… pour qu’il perdure. Apporter une réponse au sempiternel « c’est pas de mon âge, j’étais pas né(e) quand ce film est sorti« . Cela exige, de notre part, de l’énergie, de la collaboration, du travail : mais n’est-ce pas ce que l’on demande aux élèves ?
Mère Courage, en d’autres temps, m’a éveillée, émerveillée. Antigone pourrait prendre le relais aujourd’hui…
Arlette Bouigue
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